Sandrine Collette s’est imposée comme une auteure de choix lorsque l’envie m’étreint de parcourir une histoire captivante et fignolée. Nouvellement repérée par moi, elle s’est petit à petit fait un nom dans le milieu en proposant des intrigues singulières et, il me semble, jamais redondantes. Pour cette fois, c’est vers son premier roman que je me suis dirigée, bien décidée à découvrir l’intégralité de son oeuvre.

Résumé de l’éditeurDes nœuds d'acier - Sandrine Collette

Avril 2001. Dans la cave d’une ferme miteuse, au creux d’une vallée isolée couverte d’une forêt dense, un homme est enchaîné. Théo, quarante ans, a été capturé par deux frères, deux vieillards qui ont fait de lui leur esclave. Comment a-t-il basculé dans cet univers au bord de la démence ? Il n’a pourtant rien d’une proie facile : athlétique et brutal, Théo sortait de prison quand ces vieux fous l’ont piégé au fond des bois.

Mon avis

Vous connaissez les captivity thriller ? Avant d’en apprendre le terme, j’étais déjà adepte de cette catégorie de romans mettant en scène des enlèvements et séquestrations. J’en ai lu un certain nombre et, même s’ils ne sont pas tous de qualité équivalente, je leur reconnais un pouvoir addictif élevé sur ma personne, particulièrement sensible aux émotions suscitées par la situation des protagonistes. Un homme, une femme, un enfant, coincé entre quatre murs par un ravisseur aux motivations obscures.

Sandrine Collette reprend les mêmes codes. Théo, quarantenaire tout juste sorti de prison, est capturé en pleine montagne par deux vieux sadiques, Laurel et Hardy version Stephen King. S’ensuivront plusieurs mois de mauvais traitements, humiliations, tortures, travaux forcés, malnutrition, et j’en passe. Théo n’est pas seul, il partage sa cellule avec un demi-homme, prisonnier, lui, depuis 8 ans… Il est maigre comme un clou, le poil dru, la peau scarifiée, un moribond qui ne tardera pas à laisser sa place.

Le livre, sans se noyer dans l’originalité, raconte le calvaire de Théo. Oppressant, saisissant, ce récit immersif fait son effet, bien mené, rythmé et sans temps mort, il raconte une manière comme tant d’autres de réduire l’être humain, un esclavagisme d’un nouveau genre, rendu encore plus malsain par l’âge des geôlier, qui devraient ne plus s’autoriser ces amusements. Là est sans doute la singularité du texte, la petite marque de fabrique de l’auteure. Une situation exploitée à maintes reprises par les écrivains, mais ici prise en main par un duo de tortionnaires auquel l’on ne s’attend pas. Et le plus terrible est que de cette faille née une angoisse nouvelle ; l’étrangeté des bonshommes procure à l’intrigue du caractère et de l’intérêt. Tout le long, le lecteur tentera de percer les motivations de ces criminels en déambulateur.

J’ai vécu chaque jour de capture à bout de souffle, au plus près de l’agonie psychique de Théo et de la perversion bestiale de ses bourreaux, qui usent de méthodes de torture vieilles comme le monde et peu imaginatives. Cette histoire nous rappelle combien la négation des besoins vitaux (nourriture, eau, hygiène, lumière, espace, chaleur) est le pire des supplices. Au fond du cachot, le lecteur souffre des mêmes maux que son partenaire de misère. En cela, on peut dire que Des nœuds d’acier satisfait aux exigences du contrat.

Trois choses pourtant ont pêché. La première réside dans l’abandon précoce de Théo face aux deux vieux. Très tôt, son discours se colore d’abnégation, de désespoir, d’avilissement. La lutte de l’homme est vite écrasée et présentée comme impossible ; la quarantaine de Théo, sa prétendue force et son statut d’ex-détenu, n’ont que peu de poids dans sa situation, et l’on peut le comprendre. Néanmoins, il était attendu que ces éléments feraient de notre héros un morceau plus coriace que toute autre victime ordinairement présentée.

De plus, m’a manqué une liaison entre le passé récent de Théo (son incarcération) et sa présente claustration. J’attendais plus de finesse dans l’étude de ce cas, une mise en perspective davantage appuyée de la prison face à une séquestration. Il était audacieux de faire d’un homme tout juste libéré la victime d’un enlèvement, une cellule succédant à une autre. Mais n’espérez pas de dialogues et d’interactions entre les deux situations, l’auteure n’en joue pas comme elle aurait dû.

Enfin, malgré une fin véritable et close, de nombreuses questions demeurent sans réponses, notamment quant à la genèse des deux gâteux.

Après les trois romans de Sandrine Collette que j’ai à ce jour lus, je peux à présent affirmer que cette auteure ne se cantonne pas dans un registre et livre des histoires aux thèmes, aux déroulés et aux situations spécifiques. Peut-être retrouve-t-on la survie dans chacun de ses récits, la pierre angulaire de son édifice ; un besoin de placer l’être humain en situation de détresse extrême. Cette écrivain me plaît, son univers me rassure et m’est familier, j’aime voir l’homme poussé à bout, franchir les limites de ses propres capacités. Je n’hésiterai plus à m’orienter vers Sandrine Collette et la conseille de plus en plus souvent auprès de lecteurs en mal de sensations. Si vous ne la connaissez pas encore, il est temps de vous y mettre !

Et vous, avez-vous lu l’un de ses romans ?

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