J’avais envie d’une lecture légère et drôle, petit plaisir que je m’octroie rarement en littérature, lorsque je cherche à rire je préfère un film, c’est souvent plus efficace, pour le rire seulement. Mais le titre de ce roman, que j’ai souvent croisé ces derniers mois, ne cessait de revenir dans mon esprit, il m’a tapé dans l’œil. Et en lisant le résumé, qui évoque une histoire de « petit vieux aigri », j’ai su qu’il fallait que je le lise, car j’éprouve un attachement tout particulier pour les personnages âgés, souvent mémorables.

Résumé de l’éditeurOLYMPUS DIGITAL CAMERA

Ferdinand Brun, 83 ans, solitaire, bougon, acariâtre – certains diraient : seul, aigri, méchant -, s’ennuie à ne pas mourir. Son unique passe-temps ? Eviter une armada de voisines aux cheveux couleur pêche, lavande ou abricot. Son plus grand plaisir ? Rendre chèvre la concierge, Mme Suarez, qui joue les petits chefs dans la résidence. Mais lorsque sa chienne prend la poudre d’escampette, le vieil homme perde définitivement goût à la vie…jusqu’au jour où une fillette précoce et une mamie geek de 92 ans forcent littéralement sa porte, et son cœur.

Mon avis

À ceux qui détestent les clichés, vous pouvez passer votre chemin car ce livre en est rempli. Je m’y attendais, avec un petit vieux méchant en personnage principal, le reste ne pouvait que correspondre. Ainsi, il y a la coiffeuse bécasse et bavarde, la concierge bling-bling qui a « ses têtes », la petite fille surdouée, les voisines qui passent leurs journées à jacasser… Ces personnages dressent un tableau que l’on a l’impression d’avoir bien souvent croisé, par morceaux ou dans son intégralité. Ainsi, j’ai été déçue de ne pas découvrir un paysage original, sortant de l’ordinaire ou de l’imaginaire collectif. Ceci rend néanmoins le décor familier, donc potentiellement attachant. Ce livre est finalement un assemblage de petits détails qui font mouche, car on les aura certainement croisés dans notre entourage, et c’est là-dessus que joue l’auteure.  Elle décrit ses personnages en exacerbant leurs défauts, leurs petites manies. On a l’impression de les connaître, jusqu’à ce que l’aspect caricatural de leur personnalité prenne le dessus. Et, à partir de là l’histoire perd toute sa crédibilité pour devenir une comédie où l’invraisemblable règne.

Le récit est celui d’un vieux monsieur qui va doucement retrouver goût à la vie à l’aide de deux de ses voisines, une gamine et une nonagénaire.  En une année, Ferdinand va vivre plus d’aventures que ce qu’il a vécu en 83 ans, péripéties saugrenues absolument irréalistes qui surfent sur l’antipathie de Ferdinand ressentie par ceux qui le côtoient, car tout le monde semble le détester. L’intrigue la plus poussée est certainement celle autour de Daisy, sa chienne prétendument morte, dont la révélation finale est ubuesque. Ensuite, il y a les rebondissements successifs concernant la fille et le petit-fils de Ferdinand exilés à Singapour qui apportent la touche sentimentale au récit tout en contenant un dénouement idéal.

Mémé dans les orties remplit ses promesses puisque ce roman est léger et drôle, je dirais qu’il est gentillet ; les méchants ne le sont pas franchement tandis que les gentils le sont à outrance. J’ai souri, je suis rentrée dans le récit comme dans du beurre, puisque ce n’est ni l’écriture ni l’histoire en elle-même qui représentent une quelconque barrière à la compréhension du texte. Mais ce roman est uniquement léger et drôle, il n’est ni singulier, ni déjanté, ni émouvant. Il manque de pétillant, de folie, en cela il est peut-être un peu trop sage alors qu’il aurait pu largement s’épancher dans l’absurde. Quitte à nous proposer un univers de clichés autant les surjouer au maximum, parce que l’on ne sait si l’ambition de l’auteure, à travers ses personnages, était de nous en proposer des réalistes ou si elle s’est contenue dans la fantaisie par timidité, retenue, par peur peut-être d’aller trop loin. Elle nous propose un dénouement, apothéose du happy-end, dans lequel l’on ne reconnaît pas Ferdinand, qui s’est totalement moulé à un mode de vie dont on craint qu’il sera viable pour lui et son caractère.

Il est vrai que l’idée du livre est une mini leçon de vie, le récit est court pour renforcer cet aspect « page d’une existence » où tout reprend forme autour de Ferdinand. Il y a une morale derrière tout cela, ne soyons pas naïfs, et cette morale pourrait être « la vie est trop courte pour faire la gueule », ou « il n’y a pas d’âge pour se reprendre en main », enfin quelque chose dans cet esprit qui sacralise le changement, s’il est bénéfique. Mais pour en être certain il faudrait retrouver Ferdinand cinq ans plus tard, s’il est toujours en vie.

Dans une courte vidéo où l’auteure parle de son roman, elle nous dit qu’elle voulait confronter dans une même histoire deux vieillesses, l’une fataliste et déprimante, l’autre enjouée et optimiste. Ces deux visions sont représentées par deux personnages, dont Ferdinand qui incarne parfaitement la première. Si tel était son objectif, je ne suis pas certaine que c’est ce que j’en ai retenu lors de ma lecture, puisque Béatrice Claudel, la gentille mamie, est totalement écrasée par son voisin de palier. Son rôle dans l’histoire est indéniable, mais l’évolution de leur relation est trop brutale, en fait on ne peut pas réellement parler d’évolution, mais plutôt d’un virage en tête d’épingle ; car Ferdinand se lance dans une déclaration auprès de sa voisine sans qu’aucun élément n’ait, au préalable, mis le lecteur sur la piste. Aussi, l’on ne sait si sa métamorphose est liée à l’influence même de Béatrice sur Ferdinand, ou à l’espoir amoureux désespéré de ce dernier.

En conclusion, Mémé dans les orties est une lecture certes amusante, fraîche et mignonne, mais qui ne laissera pas une trace indélébile dans ma mémoire car nageant entre deux eaux qui ne se rejoignent jamais, le trop commun et l’irréaliste.

Et vous, avez-vous succombé à ce livre au titre curieux ?

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