Je poursuis ma découverte de l’œuvre de Jean-Guy Soumy, car malgré une déception à la lecture de La Tempête je reste sur mon coup de cœur initial, espérant retrouver les mêmes émotions. La quatrième de couverture de celui-ci m’a tout de suite plu, quoiqu’elle n’évoque pas un récit historique, caractéristique qui m’avait beaucoup séduite dans Le Congrés.

Résumé de l’éditeur

Le monde de Jessica s’effondre le jour où son mari, mathématicien de renommée internationale, se tire une balle dans la tête. Comment Alexandre a-t-il pu la trahir ainsi, abandonner leurs deux fils, détruire leur vie ? L’acte est d’autant plus incompréhensible qu’il ne correspond pas à l’homme qu’elle a connu. Mais qui était-il vraiment ? Peu à peu, l’histoire se fissure…

Mon avis

L’histoire commence par un drame. Le suicide particulièrement sordide d’Alexandre, époux, père de famille mais surtout mathématicien de génie. Pour son épouse, Jessica, cet acte fou reste inexpliqué. Elle n’a ni lettre ni dernière parole pour l’aider à comprendre. Il a pris ses affaires, est parti, n’est plus jamais revenu. Commence alors pour Jessica une quête insensée. Pourquoi son mari les a abandonnés, elle et leurs deux fils ? Le contexte de cette mort programmée surtout invite aux questionnements ; reclus, isolé, seul, Alexandre s’est fait exploser la tête.

Et puis, de petites choses apparaissent en triant, fouillant, classant les affaires du défunt. Entre ses notes, ses essais, ses cours, Jessica découvre des bribes de poèmes ; pas n’importe lesquels, ceux du poète dont elle est grande spécialiste. Serait-ce un signe alors qu’Alexandre s’est toujours désintéressé de son domaine d’expertise ? Petit à petit, mue par une sorte de pressentiment inqualifiable, une inquiétude née de la stupéfaction, elle met le doigt sur ce qui coince : des photos de famille témoignant d’un passé autre que celui qu’Alexandre racontait de son vivant. Il semblerait qu’il ne soit pas le français catholique que tous croyaient, pas plus qu’il ne se prénomme Alexandre et qu’il soit né à Caen.

Malgré l’enchevêtrement de thèmes classiques mais fertiles, je ne suis pas parvenue à rentrer dans ce récit, le survolant de très haut. Jessica ne m’a pas émue, son combat acharné m’a laissée indifférente. Elle semble animée par une force et une détermination qui, dès le départ, m’ont paru légèrement surjouées. Ses premiers doutes prennent une dimension titanesque. Elle s’embourbe toutes seules dans ses recherches, convaincue de la fausseté de son mari. Soit. Elle n’aura pas eu tort. Mais les minces indices découverts sont peu de chose face à l’excitation qu’elle témoigne, comme si elle savait déjà. Ensuite, il y a cette condamnation, cette décharge sur Alexandre, elle l’accuse de tout. Les morts ont toujours tort.

Jessica plonge dans une mélancolie, dans un état de détresse violent qu’elle alimente seule. Dans sa quête elle se délite, elle perd pied, elle se détourne même des bonheurs à venir représentés par la naissance de ses petits-enfants. Elle tourne le dos au monde, convaincue d’avoir été trompée, manipulée par l’homme qu’elle aimait.

L’anxiété de Jessica m’a étouffée dès les premières pages. Il n’y a aucune transition entre la tristesse et la colère, la consternation et la suspicion. À peine son mari enterré, elle se jette corps et âme dans une lutte pour la vérité, opiniâtre dans son rôle de veuve trahie. Le défaut majeur de ce livre est le manque d’une introduction. Avant le doute j’aurais aimé découvrir le couple.

Un détail a malgré tout attiré mon attention, du genre de ceux qui vous font aimer un livre. Il s’agit de Lewis, l’un des fils de Jessica, atteint d’autisme. L’auteur dresse un personnage tendre et sensible, et saisit parfaitement les subtilités de la maladie, sans voyeurisme, sans excès, il est très juste. Il a su détacher les détails de la pathologie, ces petits riens qui font le handicap. C’est délicat et bien amené. Le lien l’unissant à sa mère est soigné et retranscrit avec pudeur et retenue. Jessica, en tant que mère, particulièrement auprès de Lewis, se révèle autre et m’a plu. Alors que dans le rôle d’épouse éplorée et colérique elle se disperse, elle retrouve contenance auprès d’un être qui n’en a justement pas.

Cette histoire m’apparaît surdimensionnée par rapport à ce qu’en a fait Jean-Guy Soumy. Le tracé est mal défini. Son héroïne écrase totalement l’intrigue principale, dramatique et poignante, dont la richesse aurait mérité un meilleur traitement. C’est une histoire forte, de celles qui font de longs romans à plusieurs voix. Ici elle est abrégée, mise de côté, camouflée comme si l’auteur en avait honte. Il est en effet question de fausse identité, de secret de famille, de déportation bien sûr. Mais le lot d’émotions soulevées est emporté par la vague Jessica, personnage bancal et exagéré qui ne connaît ni mesure ni tempérance.

Jean-Guy Soumy a une plume fine et délicate. C’est amusant car je n’ai pu m’empêcher de percevoir derrière son phrasé la silhouette d’une jeune femme. Constat que j’avais déjà établi avec mes précédentes lectures. Nul doute que cet écrivain pourrait séduire un lectorat beaucoup plus large car il s’inscrit parfaitement dans la littérature actuelle.

Le Silence me laisse avec un goût d’amertume ; difficile à présent d’occulter deux déceptions pour espérer retrouver l’auteur du Congrés dans un prochain roman. J’ai voulu persévérer mais me voici bien embêtée. Je pense lui avoir laissé sa chance, je me rends à l’évidence ; un coup de cœur est souvent une affaire de hasard.

Cette critique ne me satisfait pas du tout et j’en suis désolée. Elle a été écrite avec 39 de fièvre, je n’avais pas le choix :/ Je retourne me coucher… 

Le blog risque de tourner au ralenti durant les deux prochaines semaines. Je vais prendre le soleil 🙂 en espérant que cette fichue fièvre me laisse tranquille.

 

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