Je n’avais pas lu de policier depuis un moment, alors même qu’il s’agit du genre de lecture que j’apprécie particulièrement en période estivale. J’ai pioché celui-ci dans ma bibliothèque par hasard. J’ai appris qu’il avait été recommandé par Franck Thilliez lui-même. Ceci n’est pas forcément un gage de qualité absolu, mais aimant beaucoup cet écrivain, son avis ne peut pas totalement m’indifférer .

Résumé de l’éditeur

Un industriel est retrouvé mort dans sa baignoire et les premiers éléments accréditent la thèse du suicide. Mais pour le capitaine Daniel Magne, il s’agit d’un meurtre. Reste à trouver le coupable et c’est le début d’un jeu de domino mortel qui se met en place. Chaque suspect devient victime et les morts se succèdent. De Paris à New York en passant par l’Afrique du Sud, l’enquête s’annonce pleine de rebondissements et truffé de périls pour Magne et sa coéquipière Lisa Heslin.

Mon avis

Colère noire est un roman efficace, l’auteur nous plonge dans l’action dès les premières pages avec une scène de crime énigmatique à souhait, nous laissant présager une enquête épineuse et sujette à de multiples rebondissements. J’ai ainsi été séduite par cette entrée en matière réussie, et pour ce genre de lecture ceci est un critère primordial, pour ne pas dire décisif, dans l’appréciation finale.

Ce livre possède tous les codes du bon roman policier, voire même un peu trop selon moi, je vais vous expliquer pourquoi. Nous suivons un flic à l’alcoolisme balbutiant en pleine crise conjugale, une nouvelle jeune recrue qui ne va pas laisser ce dernier indifférent, un autre flic spécialiste en bavures, et bien sur un capitaine colérique et craint par sa brigade. En bref, il semblerait que l’auteur ait pris tous les éléments relevés dans divers romans policiers et les ait regroupés dans celui-ci. Après tout, pourquoi pas, cela peut fonctionner, néanmoins le trait est gros.

En outre, l’auteur emprunte plusieurs directions qui m’ont quelque peu perdue. C’est-à-dire qu’il aborde dans le même temps une affaire vieille de plus de dix ans dans laquelle un jeune a été tué sans que l’on n’ait jamais retrouvé son corps, puis il dévie sur l’histoire d’un africain tué lors d’une partie de chasse par un buffle blessé, tout cela sur fond de manigances financières, politiques et industrielles, et d’extrémisme de droite.  En fait, j’ai beaucoup apprécié l’aspect de l’intrigue consacré à la chasse en milieu sauvage mais qui pour le coup n’est pas assez exploitée selon moi, l’auteur ayant à traiter trop de choses simultanément. Ce thème de la chasse était pourtant original, en tout cas je ne l’ai encore jamais rencontré en littérature, d’autant plus qu’il m’interpelle tout particulièrement. C’est vraiment dommage que ce ne soit qu’à la toute fin que le capitaine Magne parte en voyage en Afrique du Sud, mettant enfin un pied dans ce milieu, mais pour revenir rapidement à Paris. On se demanderait presque l’utilité de son séjour sur ces terres.

En ce qui concerne l’intrigue, vous l’aurez compris, elle s’avère plus complexe que je ne l’aurais pensé, comportant son lot de personnages qui vont tous être plus ou moins soupçonnés à un moment donné de l’enquête. Néanmoins, cette étape, nécessaire dans tout roman policier, s’effectue ici de manière trop linéaire, dans le sens où l’ardeur méthodique avec laquelle l’inspecteur procède s’avère plutôt douteuse et peu crédible. Magne passe rapidement d’un suspect à l’autre, on imagine allègrement une petite liste d’où il raye les noms dans un ordre bien précis, un peu scolaire. Cette discipline professionnelle m’a semblé pour le moins cocasse, et je doute que dans la réalité cela se passe d’une manière aussi rigoureuse. En ce sens, si on y ajoute des personnages légèrement communs, ce roman s’apparente à un cas d’école dans lequel l’auteur met sur papier tout ce qu’il connaît du genre policier. Mais le tout est beaucoup trop lisse pour moi. Cette histoire manque d’aspérité et de piment alors même que le thème de fond était pourtant prometteur. J’aurais adoré que l’auteur s’y enfonce davantage car il y avait matière à créer un policier piquant et passionnant.

Je dois dire que j’ai eu du mal à situer tous les personnages ainsi que leurs rôles dans chacune des histoires mentionnées, m’emmêlant les pinceaux à de multiples reprises. Les personnages sont tour à tour interrogés, pour finalement ne presque plus apparaître dans le récit, donnant au lecteur l’occasion de les oublier aisément. De plus, la surprise de la découverte du coupable n’a pas eu l’effet escompté sur moi. Le dénouement tombe comme un soufflé.

En parallèle à l’intrigue principale nous suivons, de manière totalement aléatoire, les problèmes conjugaux de Daniel. Malheureusement ceux-ci sont inintéressants, anecdotiques, et plutôt mal utilisés. C’est-à-dire qu’ils émergent d’entre les pages au tout début et à la fin du livre, me donnant l’impression que l’auteur avait tout simplement oublié ce pan là de son histoire, et qu’il se devait de donner un point final à cette histoire, plus pour le lecteur que dans un intérêt scénaristique. Dans le même esprit, je suis restée plutôt stoïque devant l’amour aussi soudain que cliché de Daniel Magne pour sa collègue Lisa, qui a très certainement la moitié de son âge. Ceci est du déjà-vu de trop nombreuses fois pour me faire frémir.

Autre point négatif qui m’est malencontreusement apparu immédiatement. Il y a une énorme incohérence dans ce roman, le genre d’erreur qui vient totalement faire s’écrouler l’intrigue, car celle-ci reposait en grande partie sur cet élément. Je dois admettre ne pas comprendre comment une telle absurdité a pu passer à travers les multiples relectures. Il s’agit bêtement d’un souci de dates, une lettre devant contenir des photos prises…trois ans plus tard, ce qui a de quoi interpeller. Malheureusement pour l’auteur, je n’ai pas réussi à mettre de côté ce faux pas.

En conclusion, je dirais que j’ai suivi l’intrigue au fil des pages, en me positionnant du côté de l’inspecteur; mais bien que je sois restée accrochée par le rythme plutôt soutenu, je ne suis pas parvenue à être totalement absorbée par le récit. Et cela est bien dommage car après réflexion, je dois reconnaître que l’intrigue est de qualité, avec un souci du détail et une recherche de cohérence pertinente. Mais les liens entre tous les personnages se complexifient à l’extrême, empêchant au lecteur d’avoir le recul nécessaire pour bien saisir l’étendue de ce qui nous est présenté.

En somme, Colère noire est un roman qui connaît et surexploite les ficelles du polar, mais qui par excès de zèle tombe dans une platitude décevante. Néanmoins, il a le mérite d’être divertissant, agréable à lire et cohérent (malgré l’énorme contradiction mentionnée plus haut).

Et vous, avez-vous déjà repéré des erreurs dans un roman ?

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