Aujourd’hui je vous parle d’un roman qui a marqué le 20ème siècle sur plusieurs générations, et qui représente un monument à lui tout seul. Il est une référence couverturedans son genre et cela à plus d’un titre.

C’est une dystopie que je me devais de lire, bien que je ne sois pas forcément adepte du genre. J’ai tenté de lire Le meilleur des mondes d’Aldous Huxley, je dis bien « tenté » car je n’ai pas réussi à dépasser la page 100. J’ai donc trainé à entamer 1984, que j’ai pourtant en ma possession depuis un petit moment et qui n’a rien avoir, contrairement à ce que je pensais, avec le roman de Huxley.

Résumé de l’éditeur

Souriez, vous êtes filmés… Londres, 1984. Voici Winston Smith, employé au Ministère de la Vérité, chargé de réécrire l’histoire afin qu’elle s’accorde avec la version officielle. Voici les télécrans qui diffusent en permanence les messages de propagande et espionnent sans relâche chaque individu. Voici Julia, rencontrée lors des Deux Minutes de la Haine quotidiennes et obligatoires où l’on conspue le Traître Emmanuel Goldstein, qui aura maille à partir, comme Winston, avec la Police de la Pensée. Voici la novlangue qui dépouille le langage de ses inflexions subversives, qui le réduit à un rôle informatif.

Mon avis

1984 est un roman unique, singulier et terrifiant. Je l’ai adoré, vraiment. Il a été difficile pour moi de devoir faire des pauses contraintes dans ma lecture tant j’ai été absorbée.

En parler est délicat, plus qu’une lecture, c’est une expérience qui fait ressortir des émotions rarement rencontrées en littérature.

George Orwell nous décrit un monde totalitaire dirigé par un certain Big Brother, monde sans loi, où toutes les libertés individuelles sont abolies au même titre que les émotions, les sentiments et les relations sociales. Un monde obscur, sombre, triste, abominable dont chaque être humain de cette planète trouvera un exemple, dans une moindre mesure, dans l’Histoire.

J’ai eu des frissons d’effroi tant ce qui nous est présenté est l’apogée du pire de l’homme et de ce qu’une société peut produire. On ne peut imaginer vivre en Océania, on ne peut se mettre à la place des pantins qui l’animent sans ressentir un puissant vertige accompagné d’un étouffement insoutenable.

L’horreur va crescendo. Winston Smith, le personnage principal, devient presque familier, appréciable malgré l’étroitesse de son existence, et surtout seul porteur d’un espoir dans ce chaos organisé. On s’identifie à lui, et on ressent ce qu’il ne peut que penser. Je me suis laissée engloutir par ce qu’il vit, craignant à chaque page pour sa peau. Je pense que c’est l’un des personnages littéraires avec lequel j’ai le plus « fusionné », comme si j’étais connectée en permanence à sa pensée.big brother

Son aventure avec Julia marquera ce roman. Cette relation, j’ose à peine employer le terme « amoureuse » tant il est difficile de concevoir qu’un tel sentiment puisse naître dans un monde si hostile, et puis je n’y crois pas surtout, il s’agit seulement d’une rencontre fortuite unissant deux êtres en souffrance, bref, cette relation donc est touchante tant elle est vide et sans avenir, tant elle repose sur les signes les plus voyants de l’amour, à savoir une sexualité prononcée et des paroles stéréotypées nourries de « mon amour », « mon chéri » qui ne veulent rien dans un tel contexte. Cette histoire est la plus triste que je n’ai jamais lue.

Je souhaiterais soulever un point. Il semblerait que George Orwell ait été qualifié, à la suite de ce roman, de visionnaire. Ce n’est pas le qualificatif que j’emploierais. 1984 est un roman d’anticipation dans le sens où l’action se déroule une quarantaine d’années après son écriture, mais ça s’arrête là. L’auteur n’invente rien, il ne fait qu’extrapoler une réalité perceptible à des moments donnés dans des civilisations données. Ecrit après la Seconde Guerre mondiale, il prend tout son sens. Mais en aucun cas 1984 ne saurait représenter une fiction visionnaire lisible pleinement et uniquement à notre époque. En tout cas, ce n’est pas l’impression que j’en ai eue.

Ce roman ne nous dévoile ni avancées technologiques spectaculaires, ni découvertes scientifiques majeures. Il nous décrit le pouvoir d’une oligarchie tyrannique sur une population. Il représente un excellent exemple de la psychologie de la foule et de ses conséquences sur la psychologie individuelle. Tout est vrai dans ce roman. Ce n’est pas la réalité de notre société actuelle, ça ne saurait s’en rapprocher d’aucune façon, mais ce qui est décrit est plausible, les réactions humaines sont cohérentes par rapport à l’environnement façonné. Si un tel régime politique était mis en place c’est sûrement de cette manière que les choses se passeraient, un état où toute forme de rébellion du peuple serait pratiquement inenvisageable et irréalisable tant les rouages de la machine politique seraient puissants.

1984 pourrait s’intituler « Manuel pour rendre l’autre fou ». Les plus ignorants se laissent manipuler aisément, tandis que les plus intelligents subissent les traitements les plus ignobles, à grand renfort de négation de la pensée, d’incohérence, d’illogisme, de mensonges et de mauvaise foi ; ou comment persuader l’autre que deux et deux font cinq. Bref, nous avons là le paroxysme de la perversion. Rien qu’à le lire, j’enrageais. Il n’y a pas de pire crime que celui de vouloir annihiler la pensée, l’ultime liberté qu’il reste à l’homme dans les situations les plus esclavagistes, la plus noble surtout, la plus intouchable, et pourtant.

Cela me fait penser à une petite histoire entendue durant mes études de psychologie. Comment rendre un enfant fou. Une maman offre deux cravates à son fils, une rouge et une bleue. Pour lui faire plaisir, l’enfant porte la rouge, sa maman lui dit alors : «  N’aimes-tu donc pas la cravate bleue ? ». Le fils change de cravate pour la bleue, sa mère lui dit alors : « N’aimes-tu donc pas la cravate rouge ? » et ainsi de suite…Vous voyez le mécanisme diaboliquement pervers mis en place ici et qui pourrait illustrer la réalité sociale à laquelle sont confrontés les personnages de 1984.

Si je devais relever un point négatif, ce serait le fait que j’aurais aimé en connaître davantage sur la manière donc un tel régime a été mis en place. On nous parle de l’avant révolution, et de l’après, mais on ne nous dit rien de son déroulé.

Pour conclure, je dirais simplement que ce roman est l’un des plus intelligents qu’il m’ait été donné de lire. 1984 doit être lu, si ce n’est pas déjà fait, je vous y encourage fortement. Il ne peut laisser insensible. Certains lui reprochent son manque d’événements perturbateurs et une certaine redondance. Oui, peut-être, mais ces défauts sont inhérents à ce que George Orwell veut nous dire.

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